Mai-Juin 2020
La Péninsule de kenai
Mercredi 20 mai 2020:
L’île de Kodiak s’efface peu à peu dans le sillage de Morgane. Le vent du sud-ouest a balayé les
nuages, le ciel est à nouveau bleu. La mer est quasi-plate et cette belle brise nous permet en un
seul bord de 60MN de rejoindre la Péninsule de Kenai- Le continent- à la voile!
Ce passage entre l’archipel de Kodiak et le continent, on le redoutait un peu car il peut être très
dangereux. En effet, la baie d’Anchorage a une des plus grande marée du monde. Plus de 9 mètres
d'amplitude créant un courant extraordinaire. Avec en plus un beau relief montagneux de part et
d’autre qui offre un couloir de vent à effet venturi maximum, je vous annonce que quand ça
souffle ici, vaut mieux se planquer et attendre une accalmie avant de traverser! Car l’effet courant
contre le vent provoque des vagues horribles!
Juste avant minuit, nous décidons (...) de nous arrêter dans Sunday Harbour au fond à droite dans
Dick bay. Le ciel s’est subitement couvert en quelques heures et un crachin breton voile peu à peu
le relief. Ici les pics des montagnes atteignent facilement plus de 1000m d’altitude et sont
vertigineux. C’est du lourd! On espère que la baie de Sunday harbour nous protègera du coup de
vent!
On mouille une ancre et on s’endort comme des bébés!
Au petit matin, la pluie et le vent se sont accentués! Des rafales de vent catabatique font dancer
Morgane de droite à gauche ce qui nous fait déraper. Du coup, on s’équipe de nos cirés jaunes et
changeons de spot pour aller mouiller au plus près de l’embouchure de la rivière. Cette fois-ci on
mouille deux ancres en Y afin d’atténuer la valse de Morgane. Car il n’y a rien de plus désagréable
pour nous qu'être sur le qui-vive pour décamper à tout moment! Dorénavant on évitera aussi de se
planquer au pied des montagnes sous le vent quand il annonce baston!
Pendant trois jours nous mangeons toutes les offrandes de Anton Larsen, dormons, lisons et
attendons que la météo s’améliore.
On opte pour une micro balade à terre même sous la pluie histoire de se dégourdir les jambes. Au
delà de la plage, la végétation est si dense que nous cherchons plutôt les marais ou les petits cours
d’eau pour continuer notre excursion. Nos bottes ne nous quittent plus! Et la prochaine fois, on
embarquera une machette pour traverser la forêt pluviale!
Samedi 23 mai 2020:
Après un délicieux steak de biche sauce au poivre vert et spatzlis maison, nous quittons la baie de
Port Dick sous une légère pluie mais sans vent. En longeant la côte nous apercevons une
vingtaine de chèvres de montagne blanches. Elles broutent les pentes vertes et vertigineuses du
cap de Gore point pendant que nous nous faisons un peu malmener avec la houle et le courant à
l’extérieur de la baie. En fin de journée, le ciel se découvre peu à peu et nous permet d’apercevoir
au loin notre premier glacier dans le Nuka passage, le glacier Petrof.
En même temps, notre tableau de bord du moteur nous indique qu’il y a surchauffe de
l’échappement! Il y a en effet de la fumée blanche qui sort du pot mais ça crache toujours de l’eau
.. et notre moteur quant à lui n’est pas en surchauffe? Tiens tiens... c’est étrange! Nous réduisons
tout de même les gaz et espérons que ce n’est pas trop grave! Nous nous arrêtons pour mouiller
juste un peu plus au nord de Nuka Island à Home cove afin de refroidir le moteur et prions pour
que le vent se lève les prochains jours et nous pousse jusqu’à Seward!
Dimanche 24 mai 2020:
Le lendemain matin avant de se remettre en route, nous essayons de détecter le problème de notre
moteur. Le soleil brille, il y a pas un souffle de vent ce qui me motive pour enfiler ma combinaison
Néoprène et plonger sous la coque pour vérifier si l’entrée de la pompe à eau de mer n’est pas
bouchée. Malgré la température estivale de l’air, l’eau à 7 degrés transperce ma combi et me fait
vite remonter sur le bateau! Mais je confirme que tout est clair là dessous!
Robin démonte ensuite la pompe à eau de mer du moteur pour vérifier son état. A part une pale
endommagée tout à l’air ok. Nous décidons de nous remettre en route en direction du nord-est
pour rejoindre Seward en espérant naviguer un maximum à la voile pour économiser notre moteur malade.
Ça tombe bien, la météo est avec nous et après le passage de Mc Arthur au moteur nous pouvons
continuer toutes voiles dehors en direction de Cliff bay.
Notre slalom le long de pitons rocheux et verdoyants nous donne l’impression de naviguer dans la
Baie d’Along au Vietnam. C’est magnifique!
Un dernier petit mouillage à Paradise cove avant de rallier Seward. Heureusement que le vent est
complètement tombé pour la nuit car ce n’est pas un mouillage paradisiaque comme son nom le
prétend! Je crois qu’on n'a jamais mouillé notre ancre si près de la plage tellement (...) la baie est
profonde! Cependant le décor vu du ciel grâce à notre drone est splendide!
Lundi 25 mai 2020:
Nous passons le cap Aialik avec notre moteur au régime mini .. et heureusement la brise du sud-
ouest se lève dans la baie de Résurrection et nous permet de rejoindre Seward sous SPI! Juste du
grand bonheur!
C’est marrant on avait presque oublié qu’il existait des bateaux à voiles.. le port de Seward nous
remet vite à la page! Il y en a au moins une centaine !! On s’amarre au ponton “Transient” et on
part investir les quais à la recherche d’un wifi!
Mardi 26 mai 2020:
Difficile de faire grasse mat quand on a un souci de moteur! Dès la première heure, le
compartiment qui abrite le moteur est démonté afin d’accéder facilement à toutes les parties de
celui-ci et particulièrement à celle du vase d’expansion qui mérite un sacré coup de nettoyage! On
ne voit même plus à travers tellement (...) il est encrassé!
Il est vrai que nous avons un peu délaissé notre moteur ces derniers temps.. n’étant pas des
mécanos dans l’âme, nous n’avons pas le reflex de checker notre bon moteur Peugeot ! Oui, c’est
bien le moteur d’une Peugeot 106 « marinisé »qui nous permet d’avancer quand il n’y a pas de
vent!
Nous voici donc à rincer notre circuit de refroidissement (eau douce) avec du vinaigre.. c’est un
conseil que nous avait donné Olivier du Breskell pour purger et nettoyer le moteur..
On fait donc l’opération 3 fois.. c’est à dire que nous remplissons notre (boillon???) de vinaigre,
mettons en route le moteur pendant 10min et une fois éteint on vidange par le vase ! Trois fois de
suite.. !
.. Ça c’était avant que nous rentrions en contact avec Jacques Gely ingénieur de notre moteur à la
retraite!
Après cette opération, on part faire deux, trois courses au Safeway et passons dire bonjour à Inook
à sec (le voilier français avec qui nous avons passé le passage du nord-ouest). Laurent l’a sorti de
l’eau pour l’hiver avant de rentrer en Bretagne.
Jeudi 28 mai 2020:
Départ de Seward à 9h. A peine sorti de la baie de Résurrection, le pot fume blanc et l’alarme de
température de l’échappement se met à sonner. On s’arrête donc dans la crique de Humpy cove
pour prendre une douche sur le pont et mangeons une délicieuse lasagne le temps que le moteur
refroidisse ..
Nous retournons à Seward en fin d’après-midi pour réparer notre moteur.
A peine amarré au ponton nous procédons au ramonage du coude d’échappement et au nettoyage
du vase d’échappement en plastique.. on contrôle aussi toute la tuyauterie eau salée. A part un peu
de calamine dans le coude, tout a l’air ok.
Vendredi 29 mai 2020:
On quitte Seward dans l’après-midi pour re-tester notre moteur.
5 MN plus loin, même scénario; ça fume et ça sonne.. retour au port !
Robin change l’impeller (la pompe à eau de mer). Et à 19h on repart tester notre moteur ..
Passé les 5MN tout va bien ça fume moins et l’alarme ne s’enclenche pas!
Du coup, on continue en direction du Prince William sound retrouver nos amis sur Fredoya!
Cependant, à peine passé le cap de Résurrection 20MN plus loin, tout se remet à clignoter et
sonner! C’est une heure du mat le soleil vient de se coucher mais il fait encore jour! On retourne à
Seward avec notre moteur sur régime mini!! Ce retour est long, il dure toute une nuit à l’allure de
3knots!
On s’amarre à notre ponton favori sur le coup de 6h du matin et allons nous coucher..
Samedi 30 mai 2020:
Au réveil à midi, on démonte à nouveau entièrement la cage d’escalier pour accéder au moteur de
tous les côtés et appelons Jacques Gely par WhatsApp. Heureusement il n’est pas encore couché!
Après notre compte rendu, il nous explique comment procéder pour nettoyer notre circuit de
refroidissement moteur.
Tout d’abord nous devons vidanger notre circuit à l’eau douce et non au vinaigre.. 4 fois ! Et vider
par la purge du bloc moteur et non par le vase d’expansion puis remettre un bon liquide de
refroidissement!
Puis, on ferme les vannes de diesel et d’eau de mer. On déconnecte tous les tuyaux de la pompe à
eau de mer et là enfin on trouve le bouchon!! C’est à l’entrée de l’échangeur que ça coince! Un
vrai bordel : des bouts de pales en caoutchouc, des épines de pin et des petits bouts d’algues! On
comprend bien pourquoi il n’y avait pas assez de débit d’eau de mer pour refroidir correctement
notre pot d’échappement!
C’est à ce moment-là que nous devons suivre précisément les instructions de notre cher Jacques
Gely pour démonter l’échangeur. C’est une opération délicate surtout pour remonter la pièce car
l’étanchéité des deux têtes rondes doit être irréprochable!
A l’intérieur de l’échangeur l’eau douce et l’eau salée y transitent mais sans se mélanger!
Complexe la pièce!
L’eau salée rentre dans le faisceau muni d’une centaine de tubes, pour aller ensuite refroidir le pot
d’échappement alors que l’eau douce (liquide de refroidissement) chemine autour de celle ci pour
aller refroidir le moteur.
Bref on va devenir des experts en mécanique un jour quand on aura démonté toutes les pièces de
notre moteur!
Heureusement rien est cassé! il faut juste bien tout nettoyer! Et vérifier de temps en temps que les
tuyaux soient propres!
Maintenant que tout est réparé et que nous sommes enfin prêts à quitter Seward une bonne fois
pour toutes, le mauvais temps est arrivé et nous retient amarré au ponton encore deux jours!
Robin en profite donc pour faire le service complet du moteur. A savoir après 300 heures moteur,
il faut change les filtres et pré-filtre du gasoil et le filtre à huile. Comme on a le temps, il vidange
aussi l’huile moteur, change la sonde de pression d’huile et nettoie les bougies de préchauffage.
Moi pendant ce temps je joue aux instrumentistes pour Robin, cuisine, et reste connectée avec le
monde extérieur!
Pour se déplier le corps et respirer autre chose que l'odeur d’huile et de diesel, on part se promener
dans les alentours de Seward. Sur le chemin, on récolte des fleurs de sureau pour faire du sirop, de
la rhubarbe pour faire une bonne tarte et malheureusement toujours pas de Morilles en vue !
Jeudi 4 juin 2020:
Cette fois c’est le bon ! On quitte une fois pour toutes Seward au moteur, sans fumée ni alarme !
Houraaaa!!
On passe le Cap de Résurrection entourés de mouettes et de maquareux. Nous longeons la chaîne
des Chugach mountains et apercevons au loin un groupe d’orques et des baleines à bosse. Il y a du
monde dans l’eau!
Nous arrivons aux portes du Prince William sound. Juste avant de mouiller à Blue fox farm au
sud de l’île Erlington, Robin pêche un petit flétan pour le dîner et nous contactons par WhatsApp
Fredoya pour organiser nos retrouvailles !
Incroyable mais vrai, il y a du réseau téléphonique 4G!!
Vendredi 5 juin 2020:
Robin a vu sur un Tuto YouTube que le meilleur endroit dans le Prince William Sound pour
pêcher de la crevette, c’est entre 100 et 200m de profondeur devant un glacier. Donc c’est parti
pour l’exploration de tous les glaciers de la région ! A commencer par le glacier Bainbridge situé
à 5MN au nord de notre position.
Le temps est parfaitement calme! Nous larguons notre panier à crevette 5 euros made in China
avec la carcasse du flétan a 100m de profondeur devant le glacier et nous mouillons l’ancre
quelques mètres plus près de l’embouchure de la rivière.
Le retirement du glacier Bainbridge a créé un lac séparant l’océan de ses falaises de glace. Nous
empruntons cette rivière à bord de notre dingy et slalomons entre les glaçons qui s’échappent du
lac. Nous continuons notre exploration à pieds le long de la plage pour nous approcher au plus
près du glacier.
Le ciel s’éclaircit et laisse les rayons du soleil déposer des spots de lumière par ci par là! Le
spectacle est à couper le souffle. On se sent vraiment ridicule face à cette immensité !
On retourne sur Morgane croquer une morce (un morceau...) pour observer avec un peu plus de
recul le glacier. Et tourner des séquences avec le Drone.
Puis nous nous remettons en route pour un autre mouillage quelques milles plus au nord. C’est au
tour du témoin de l’huile du moteur de s’allumer? Ah non encore un souci de moteur!
On l’éteint et Robin m’annonce que la jauge est sèche ! Ce qui est étrange car il n’y a pas de fuite
en vue? Elle s’est volatilisée ?! On continue donc à la voile jusque dans Puffin cove où nous
mouillons l’ancre sans utiliser le moteur! C’est chaud car la baie entre deux rochers n’est pas très
large mais les conditions de vent faible nous permettent de manœuvrer parfaitement !
Fredoya nous rejoint à l’heure de l’apéro!
Fredoya c’est un magnifique dériveur en alu de 17 mètres de long construit et skippé par Fred
(Frederic) et Fredo (Frédérique). Un couple français qui vivent à bord depuis plus de 5 ans.
On devait passer l’hiver avec eux à Cordova avant d’être coincés à Kodiak.
Les retrouvailles sont donc très chaleureuses !!
On passe le week-end ensemble dans la même petite baie de Puffin Cove. On profite du beau
temps pour se balader, se frayer un chemin à travers la végétation dense et les cacas des ours.
D’ailleurs des ours noirs nous rendent visite chaque matin au bord de la plage. On dirait que notre
présence sur l’eau ne les effraye pas tant que nous restons muet! Ils sont occupés à retourner les
cailloux pour grignoter les asticots!
Robin profite des bonnes connaissances de Fred en mécanique pour savoir où est passé notre
huile?
Facile .. elle était allée se cacher dans le nouveau filtre à huile que nous avons changé et oublié de
pré -remplir !!
Il fait un temps splendide! L’été est arrivé !!! On fait une nave test avec les deux Freds à bord de
Morgane pour aller récupérer notre panier à crevette devant le glacier Bainbridge. En route, on
lance les paris.. finalement on était tous un peu pessimistes! Car notre première pêche à la crevette
se monte à 22 petites, 3 moyennes et une grosse!
Pour accompagner notre hors d’œuvre, Robin nous pêche deux beaux Arctic chars dans le lac à
côté du mouillage. On se régale à bord de Fredoya!
Mardi 9 juin 2020:
Au réveil Fredoya est déjà reparti en direction de Seward. Nous mettons le cap à l’Ouest et partons
à la découverte du Prince William Sound!
Mais juste avant, nous retournons déposer notre panier à crevette devant le glacier et nous allons
mouiller dans Hogg bay située juste en face du glacier Bainbridge. A l’entrée de la baie, les
saumons sont arrivés. Ils sautent de part et d’autre de Morgane. Robin devient fou! On réduit la
toile afin d’avancer à 1 knot et pêcher à la traîne! Mais ça ne marche pas. Alors Robin lance son
leurre depuis le pont au plus près des saumons, une dizaine de fois.. et enfin au 11ème lancer ça
mord!! Il remonte un magnifique Sockeye salmon à la chaire rouge vive!
Le lendemain matin retour au glacier pour relever notre panier. Et à notre grande surprise, il est
vide et déchiré! Oh ben ça alors? Un poisson, un requin c’est retrouvé coincé dans une des
entrées? Et il a tout déchiré en voulant se libérer? Bizarre! On peut inventer un tas de scénarios..
ça restera un mystère! Mais on ne va pas abandonner notre nouveau défi.. on va réparer ce panier
et même convertir notre deuxième panier à crabe en panier à crevettes pour mettre toutes les
chances de notre côté et pêcher de la crevette dans le Prince William Sound!
L’île de Kodiak s’efface peu à peu dans le sillage de Morgane. Le vent du sud-ouest a balayé les
nuages, le ciel est à nouveau bleu. La mer est quasi-plate et cette belle brise nous permet en un
seul bord de 60MN de rejoindre la Péninsule de Kenai- Le continent- à la voile!
Ce passage entre l’archipel de Kodiak et le continent, on le redoutait un peu car il peut être très
dangereux. En effet, la baie d’Anchorage a une des plus grande marée du monde. Plus de 9 mètres
d'amplitude créant un courant extraordinaire. Avec en plus un beau relief montagneux de part et
d’autre qui offre un couloir de vent à effet venturi maximum, je vous annonce que quand ça
souffle ici, vaut mieux se planquer et attendre une accalmie avant de traverser! Car l’effet courant
contre le vent provoque des vagues horribles!
Juste avant minuit, nous décidons (...) de nous arrêter dans Sunday Harbour au fond à droite dans
Dick bay. Le ciel s’est subitement couvert en quelques heures et un crachin breton voile peu à peu
le relief. Ici les pics des montagnes atteignent facilement plus de 1000m d’altitude et sont
vertigineux. C’est du lourd! On espère que la baie de Sunday harbour nous protègera du coup de
vent!
On mouille une ancre et on s’endort comme des bébés!
Au petit matin, la pluie et le vent se sont accentués! Des rafales de vent catabatique font dancer
Morgane de droite à gauche ce qui nous fait déraper. Du coup, on s’équipe de nos cirés jaunes et
changeons de spot pour aller mouiller au plus près de l’embouchure de la rivière. Cette fois-ci on
mouille deux ancres en Y afin d’atténuer la valse de Morgane. Car il n’y a rien de plus désagréable
pour nous qu'être sur le qui-vive pour décamper à tout moment! Dorénavant on évitera aussi de se
planquer au pied des montagnes sous le vent quand il annonce baston!
Pendant trois jours nous mangeons toutes les offrandes de Anton Larsen, dormons, lisons et
attendons que la météo s’améliore.
On opte pour une micro balade à terre même sous la pluie histoire de se dégourdir les jambes. Au
delà de la plage, la végétation est si dense que nous cherchons plutôt les marais ou les petits cours
d’eau pour continuer notre excursion. Nos bottes ne nous quittent plus! Et la prochaine fois, on
embarquera une machette pour traverser la forêt pluviale!
Samedi 23 mai 2020:
Après un délicieux steak de biche sauce au poivre vert et spatzlis maison, nous quittons la baie de
Port Dick sous une légère pluie mais sans vent. En longeant la côte nous apercevons une
vingtaine de chèvres de montagne blanches. Elles broutent les pentes vertes et vertigineuses du
cap de Gore point pendant que nous nous faisons un peu malmener avec la houle et le courant à
l’extérieur de la baie. En fin de journée, le ciel se découvre peu à peu et nous permet d’apercevoir
au loin notre premier glacier dans le Nuka passage, le glacier Petrof.
En même temps, notre tableau de bord du moteur nous indique qu’il y a surchauffe de
l’échappement! Il y a en effet de la fumée blanche qui sort du pot mais ça crache toujours de l’eau
.. et notre moteur quant à lui n’est pas en surchauffe? Tiens tiens... c’est étrange! Nous réduisons
tout de même les gaz et espérons que ce n’est pas trop grave! Nous nous arrêtons pour mouiller
juste un peu plus au nord de Nuka Island à Home cove afin de refroidir le moteur et prions pour
que le vent se lève les prochains jours et nous pousse jusqu’à Seward!
Dimanche 24 mai 2020:
Le lendemain matin avant de se remettre en route, nous essayons de détecter le problème de notre
moteur. Le soleil brille, il y a pas un souffle de vent ce qui me motive pour enfiler ma combinaison
Néoprène et plonger sous la coque pour vérifier si l’entrée de la pompe à eau de mer n’est pas
bouchée. Malgré la température estivale de l’air, l’eau à 7 degrés transperce ma combi et me fait
vite remonter sur le bateau! Mais je confirme que tout est clair là dessous!
Robin démonte ensuite la pompe à eau de mer du moteur pour vérifier son état. A part une pale
endommagée tout à l’air ok. Nous décidons de nous remettre en route en direction du nord-est
pour rejoindre Seward en espérant naviguer un maximum à la voile pour économiser notre moteur malade.
Ça tombe bien, la météo est avec nous et après le passage de Mc Arthur au moteur nous pouvons
continuer toutes voiles dehors en direction de Cliff bay.
Notre slalom le long de pitons rocheux et verdoyants nous donne l’impression de naviguer dans la
Baie d’Along au Vietnam. C’est magnifique!
Un dernier petit mouillage à Paradise cove avant de rallier Seward. Heureusement que le vent est
complètement tombé pour la nuit car ce n’est pas un mouillage paradisiaque comme son nom le
prétend! Je crois qu’on n'a jamais mouillé notre ancre si près de la plage tellement (...) la baie est
profonde! Cependant le décor vu du ciel grâce à notre drone est splendide!
Lundi 25 mai 2020:
Nous passons le cap Aialik avec notre moteur au régime mini .. et heureusement la brise du sud-
ouest se lève dans la baie de Résurrection et nous permet de rejoindre Seward sous SPI! Juste du
grand bonheur!
C’est marrant on avait presque oublié qu’il existait des bateaux à voiles.. le port de Seward nous
remet vite à la page! Il y en a au moins une centaine !! On s’amarre au ponton “Transient” et on
part investir les quais à la recherche d’un wifi!
Mardi 26 mai 2020:
Difficile de faire grasse mat quand on a un souci de moteur! Dès la première heure, le
compartiment qui abrite le moteur est démonté afin d’accéder facilement à toutes les parties de
celui-ci et particulièrement à celle du vase d’expansion qui mérite un sacré coup de nettoyage! On
ne voit même plus à travers tellement (...) il est encrassé!
Il est vrai que nous avons un peu délaissé notre moteur ces derniers temps.. n’étant pas des
mécanos dans l’âme, nous n’avons pas le reflex de checker notre bon moteur Peugeot ! Oui, c’est
bien le moteur d’une Peugeot 106 « marinisé »qui nous permet d’avancer quand il n’y a pas de
vent!
Nous voici donc à rincer notre circuit de refroidissement (eau douce) avec du vinaigre.. c’est un
conseil que nous avait donné Olivier du Breskell pour purger et nettoyer le moteur..
On fait donc l’opération 3 fois.. c’est à dire que nous remplissons notre (boillon???) de vinaigre,
mettons en route le moteur pendant 10min et une fois éteint on vidange par le vase ! Trois fois de
suite.. !
.. Ça c’était avant que nous rentrions en contact avec Jacques Gely ingénieur de notre moteur à la
retraite!
Après cette opération, on part faire deux, trois courses au Safeway et passons dire bonjour à Inook
à sec (le voilier français avec qui nous avons passé le passage du nord-ouest). Laurent l’a sorti de
l’eau pour l’hiver avant de rentrer en Bretagne.
Jeudi 28 mai 2020:
Départ de Seward à 9h. A peine sorti de la baie de Résurrection, le pot fume blanc et l’alarme de
température de l’échappement se met à sonner. On s’arrête donc dans la crique de Humpy cove
pour prendre une douche sur le pont et mangeons une délicieuse lasagne le temps que le moteur
refroidisse ..
Nous retournons à Seward en fin d’après-midi pour réparer notre moteur.
A peine amarré au ponton nous procédons au ramonage du coude d’échappement et au nettoyage
du vase d’échappement en plastique.. on contrôle aussi toute la tuyauterie eau salée. A part un peu
de calamine dans le coude, tout a l’air ok.
Vendredi 29 mai 2020:
On quitte Seward dans l’après-midi pour re-tester notre moteur.
5 MN plus loin, même scénario; ça fume et ça sonne.. retour au port !
Robin change l’impeller (la pompe à eau de mer). Et à 19h on repart tester notre moteur ..
Passé les 5MN tout va bien ça fume moins et l’alarme ne s’enclenche pas!
Du coup, on continue en direction du Prince William sound retrouver nos amis sur Fredoya!
Cependant, à peine passé le cap de Résurrection 20MN plus loin, tout se remet à clignoter et
sonner! C’est une heure du mat le soleil vient de se coucher mais il fait encore jour! On retourne à
Seward avec notre moteur sur régime mini!! Ce retour est long, il dure toute une nuit à l’allure de
3knots!
On s’amarre à notre ponton favori sur le coup de 6h du matin et allons nous coucher..
Samedi 30 mai 2020:
Au réveil à midi, on démonte à nouveau entièrement la cage d’escalier pour accéder au moteur de
tous les côtés et appelons Jacques Gely par WhatsApp. Heureusement il n’est pas encore couché!
Après notre compte rendu, il nous explique comment procéder pour nettoyer notre circuit de
refroidissement moteur.
Tout d’abord nous devons vidanger notre circuit à l’eau douce et non au vinaigre.. 4 fois ! Et vider
par la purge du bloc moteur et non par le vase d’expansion puis remettre un bon liquide de
refroidissement!
Puis, on ferme les vannes de diesel et d’eau de mer. On déconnecte tous les tuyaux de la pompe à
eau de mer et là enfin on trouve le bouchon!! C’est à l’entrée de l’échangeur que ça coince! Un
vrai bordel : des bouts de pales en caoutchouc, des épines de pin et des petits bouts d’algues! On
comprend bien pourquoi il n’y avait pas assez de débit d’eau de mer pour refroidir correctement
notre pot d’échappement!
C’est à ce moment-là que nous devons suivre précisément les instructions de notre cher Jacques
Gely pour démonter l’échangeur. C’est une opération délicate surtout pour remonter la pièce car
l’étanchéité des deux têtes rondes doit être irréprochable!
A l’intérieur de l’échangeur l’eau douce et l’eau salée y transitent mais sans se mélanger!
Complexe la pièce!
L’eau salée rentre dans le faisceau muni d’une centaine de tubes, pour aller ensuite refroidir le pot
d’échappement alors que l’eau douce (liquide de refroidissement) chemine autour de celle ci pour
aller refroidir le moteur.
Bref on va devenir des experts en mécanique un jour quand on aura démonté toutes les pièces de
notre moteur!
Heureusement rien est cassé! il faut juste bien tout nettoyer! Et vérifier de temps en temps que les
tuyaux soient propres!
Maintenant que tout est réparé et que nous sommes enfin prêts à quitter Seward une bonne fois
pour toutes, le mauvais temps est arrivé et nous retient amarré au ponton encore deux jours!
Robin en profite donc pour faire le service complet du moteur. A savoir après 300 heures moteur,
il faut change les filtres et pré-filtre du gasoil et le filtre à huile. Comme on a le temps, il vidange
aussi l’huile moteur, change la sonde de pression d’huile et nettoie les bougies de préchauffage.
Moi pendant ce temps je joue aux instrumentistes pour Robin, cuisine, et reste connectée avec le
monde extérieur!
Pour se déplier le corps et respirer autre chose que l'odeur d’huile et de diesel, on part se promener
dans les alentours de Seward. Sur le chemin, on récolte des fleurs de sureau pour faire du sirop, de
la rhubarbe pour faire une bonne tarte et malheureusement toujours pas de Morilles en vue !
Jeudi 4 juin 2020:
Cette fois c’est le bon ! On quitte une fois pour toutes Seward au moteur, sans fumée ni alarme !
Houraaaa!!
On passe le Cap de Résurrection entourés de mouettes et de maquareux. Nous longeons la chaîne
des Chugach mountains et apercevons au loin un groupe d’orques et des baleines à bosse. Il y a du
monde dans l’eau!
Nous arrivons aux portes du Prince William sound. Juste avant de mouiller à Blue fox farm au
sud de l’île Erlington, Robin pêche un petit flétan pour le dîner et nous contactons par WhatsApp
Fredoya pour organiser nos retrouvailles !
Incroyable mais vrai, il y a du réseau téléphonique 4G!!
Vendredi 5 juin 2020:
Robin a vu sur un Tuto YouTube que le meilleur endroit dans le Prince William Sound pour
pêcher de la crevette, c’est entre 100 et 200m de profondeur devant un glacier. Donc c’est parti
pour l’exploration de tous les glaciers de la région ! A commencer par le glacier Bainbridge situé
à 5MN au nord de notre position.
Le temps est parfaitement calme! Nous larguons notre panier à crevette 5 euros made in China
avec la carcasse du flétan a 100m de profondeur devant le glacier et nous mouillons l’ancre
quelques mètres plus près de l’embouchure de la rivière.
Le retirement du glacier Bainbridge a créé un lac séparant l’océan de ses falaises de glace. Nous
empruntons cette rivière à bord de notre dingy et slalomons entre les glaçons qui s’échappent du
lac. Nous continuons notre exploration à pieds le long de la plage pour nous approcher au plus
près du glacier.
Le ciel s’éclaircit et laisse les rayons du soleil déposer des spots de lumière par ci par là! Le
spectacle est à couper le souffle. On se sent vraiment ridicule face à cette immensité !
On retourne sur Morgane croquer une morce (un morceau...) pour observer avec un peu plus de
recul le glacier. Et tourner des séquences avec le Drone.
Puis nous nous remettons en route pour un autre mouillage quelques milles plus au nord. C’est au
tour du témoin de l’huile du moteur de s’allumer? Ah non encore un souci de moteur!
On l’éteint et Robin m’annonce que la jauge est sèche ! Ce qui est étrange car il n’y a pas de fuite
en vue? Elle s’est volatilisée ?! On continue donc à la voile jusque dans Puffin cove où nous
mouillons l’ancre sans utiliser le moteur! C’est chaud car la baie entre deux rochers n’est pas très
large mais les conditions de vent faible nous permettent de manœuvrer parfaitement !
Fredoya nous rejoint à l’heure de l’apéro!
Fredoya c’est un magnifique dériveur en alu de 17 mètres de long construit et skippé par Fred
(Frederic) et Fredo (Frédérique). Un couple français qui vivent à bord depuis plus de 5 ans.
On devait passer l’hiver avec eux à Cordova avant d’être coincés à Kodiak.
Les retrouvailles sont donc très chaleureuses !!
On passe le week-end ensemble dans la même petite baie de Puffin Cove. On profite du beau
temps pour se balader, se frayer un chemin à travers la végétation dense et les cacas des ours.
D’ailleurs des ours noirs nous rendent visite chaque matin au bord de la plage. On dirait que notre
présence sur l’eau ne les effraye pas tant que nous restons muet! Ils sont occupés à retourner les
cailloux pour grignoter les asticots!
Robin profite des bonnes connaissances de Fred en mécanique pour savoir où est passé notre
huile?
Facile .. elle était allée se cacher dans le nouveau filtre à huile que nous avons changé et oublié de
pré -remplir !!
Il fait un temps splendide! L’été est arrivé !!! On fait une nave test avec les deux Freds à bord de
Morgane pour aller récupérer notre panier à crevette devant le glacier Bainbridge. En route, on
lance les paris.. finalement on était tous un peu pessimistes! Car notre première pêche à la crevette
se monte à 22 petites, 3 moyennes et une grosse!
Pour accompagner notre hors d’œuvre, Robin nous pêche deux beaux Arctic chars dans le lac à
côté du mouillage. On se régale à bord de Fredoya!
Mardi 9 juin 2020:
Au réveil Fredoya est déjà reparti en direction de Seward. Nous mettons le cap à l’Ouest et partons
à la découverte du Prince William Sound!
Mais juste avant, nous retournons déposer notre panier à crevette devant le glacier et nous allons
mouiller dans Hogg bay située juste en face du glacier Bainbridge. A l’entrée de la baie, les
saumons sont arrivés. Ils sautent de part et d’autre de Morgane. Robin devient fou! On réduit la
toile afin d’avancer à 1 knot et pêcher à la traîne! Mais ça ne marche pas. Alors Robin lance son
leurre depuis le pont au plus près des saumons, une dizaine de fois.. et enfin au 11ème lancer ça
mord!! Il remonte un magnifique Sockeye salmon à la chaire rouge vive!
Le lendemain matin retour au glacier pour relever notre panier. Et à notre grande surprise, il est
vide et déchiré! Oh ben ça alors? Un poisson, un requin c’est retrouvé coincé dans une des
entrées? Et il a tout déchiré en voulant se libérer? Bizarre! On peut inventer un tas de scénarios..
ça restera un mystère! Mais on ne va pas abandonner notre nouveau défi.. on va réparer ce panier
et même convertir notre deuxième panier à crabe en panier à crevettes pour mettre toutes les
chances de notre côté et pêcher de la crevette dans le Prince William Sound!