Juin 2019
Sismiut a disko: la magie de la glace
Lundi 10 juin: Denis est arrivé à Sisimiut deux jours après le départ de Patricia et Etienne. Deux jours c’est le temps pour profiter de Morgane à deux! Le temps de sécher les matelas sur le pont et de bien aérer toutes les couchettes sous un soleil de plomb. De faire deux trois allers-retours avec les jerricans d’eau pour remplir les cuves du bateau. Le temps aussi de faire la connaissance de Roger, un australien qui navigue depuis 4ans dans l’arctique à bord de son bateau moteur de 9m qui est un ancien bateau de sauvetage des coast guard canadiens. En venant boire le café à bord de Morgane, il nous raconte à l’aide de belles images et des cartes référencées tous les mouillages possibles le long du passage du nord-ouest. Il nous informe sur les courants et les liens internet à télécharger pour être au courant de la glace et de la météo. Bref Il est passionnant ce gars! On rencontre aussi Fred de Tahiti, un français généreux qui nous offre la bible du passage du Nord Ouest : Arctic and Northern waters.
Enfin on récupère nos skis et nos planches de Surf chez Elizabeth et Magnus.
Eh oui! Il est temps de faire un bout de route en direction du nord! Il commence à faire trop chaud sur le cercle polaire arctique!
De retour au bateau avec l’annexe chargée comme une mule sous le regard amusé d’Elizabeth qui se demande bien comment on arrive à manœuvrer avec nos deux gros board bag, Denis nous accueille sur Morgane! Son vol est finalement arrivé en avance!
Denis c’est un ami voileux de Robin. Il est passionné de bateau en bois et navigue souvent entre La Rochelle et la Bretagne en passant par le lac de Neuch!
Donc l’idée pour ces prochaines semaines est de naviguer jusqu’à Aasiaat, situé à l’entrée de la baie de Disko. Mais pour y arriver, il nous faut du vent du sud ou pétole (pas de vent)! Alors en attendant que le vent du Nord veuille bien se calmer, on se balade dans Sisimiut, on passe par la bibliothèque pour un check wifi et au Pissifik pour ravitailler Morgane.
La veille du départ on mange une dernière salade de pissenlits fraîchement cueillis et on passe embrasser une dernière fois Elizabeth et Magnus en espérant ne pas revenir tout de suite à Sisimiut! Même si on s’y sent comme à la maison ..
Mercredi 12 juin: A 11:15 on met les voiles sous un magnifique ciel bleu ! Bye bye Sisimiut! Cap au nord à la recherche d’un mouillage pour s’abriter d’un coup de sud pour la nuit. On longe la côte tout en sachant que jusqu’à Ukivik il est difficile de trouver une petite baie bien abritée sans devoir s’enfoncer dans l’un des trois fjords au nord de Sisimiut. On en a quand même repéré quatre sur la carte mais notre sondeur nous indique à chaque fois qu’il n’y a pas assez d’eau pour mouiller l’ancre. Finalement après 4h de partie de cache-cache on mouille l’ancre juste derrière le phare de Ukivik, ancienne station baleinière.
Les gars sont partis avec l’annexe pêcher et faire un petit tour à terre pour ramener un bois de renne à la place des truites souhaitées. A leur retour, le vent a tourné sud et il commence à souffler un peu fort pour passer la nuit en sécurité.. du coup on relève l’ancre et partons nous mettre à l’abri de l’île qui marque le cap le plus à l’ouest du Groenland.
Jeudi 13 juin: La nuit a été calme. Mais trop courte! Les mecs sont debout à 6:00 du mat pour se remettre en route avant qu’un nouveau coup de sud ne nous arrive dessus. Le temps est gris, il pleut. J’émerge de ma couchette à l’entrée du deuxième fjord 4h après qu’on soit partis!
Cette fois on perd moins de temps pour trouver un abri. On mouille l’ancre dans une petite anse au sud du fjord Nordre Stroemfjord et on profite d’une belle éclaircie pour aller se balader à terre jusqu’au lac situé à 2 kms. On lézarde pas trop longtemps! De notre point de vue perché sur les cailloux comme tombés du ciel, on voit qu’à l’extérieur du fjord au large ça souffle fort! La mer est toute blanche ! On s’empresse de remonter à bord de Morgane pour se déplacer encore de quelques mètres afin de mouiller le plus près possible de la minuscule plage entre les deux patates. Le vent se renforce .. on décide de mettre une deuxième ancre pour être sûr de ne pas déraper! On ne quitte plus le bateau cette fois-ci. On joue aux cartes, on mange, on lit, on dort et on check toutes les 5 minutes notre position.. et la météo! Pas le temps de s’embêter!
Samedi 15 juin: Voilà tout s'est bien passé! Le bateau n’a pas bougé d’un poil, le pont est rincé, le ciel bleu revient, après 48h de planque on peut donc se remettre en route vers 10:30 pour rejoindre Attu, un petit village construit sur une petite île.
On commence à croiser de plus en plus d’icebergs. Denis ne lâche plus la barre! On mouille juste devant le village en évitant deux gros glaçons.
Dimanche 16 juin: On continue notre visite de petits villages côtiers avec un temps splendide. Après une belle navigation à la voile au milieu des petites îles et le passage critique d’une petite passe jonchée de cailloux mal répertoriés et à fort courant contraire, on mouille l’ancre devant Kangasiaq. Il est 22:00 le vent est complètement tombé, condition idéale pour pêcher. Ça fait longtemps que nous n’avons rien choppé ! La pêche est variée. Étoile de mer, rascasse, flétans et même un loup de mer a mordu à l’hameçon de Denis. A nouveau on se demande si c’est bon à manger. Il est énorme. On se demande aussi comment on va le sortir de l’eau sans y laisser un doigt .. bref ce moment d’incertitude lui permet de retrouver sa liberté! Tant mieux pour lui. On se contentera de deux petits cabillauds au four.
Le lendemain matin on débarque à la commune où nous sommes reçus comme des princes! La charmante dame nous souhaite la bienvenue et nous autorise à utiliser l’ordinateur pour checker la météo et l’état des glaces.
Plus l’été s’installe et plus notre espoir de rejoindre le pacifique par le passage du nord-ouest se renforce.
Après un petit passage obligé au Pissifik nous relevons l’ancre à 15:00 et hissons les voiles pour rejoindre Aasiaat.
On mouille dans une petite baie au sud d’Aasiaat juste à côté d’une petite île peuplée de 25 chiens groenlandais. Les chiens du Groenland sont constitués de 70% de gènes de loup. L’avantage de les placer sur ces îles est qu’ils n’ont pas besoin d’être attaché. Malheureusement ils n’ont pas appris à nager.
Mardi 18 juin: Après un bon petit déjeuner on part se dégourdir les jambes pour rejoindre à pieds le village d’Aasiaat situé à 3-4 km du mouillage. On visite la bibliothèque qui occupe une maison ancienne joliment perchée avec la vue sur la baie de Disko. On aperçoit au loin les glaciers de l’île Disko. Ce premier point de vue est juste magnifique!
On s’arrête ensuite au port pour saluer André le navigateur hollandais avec son Willywaw amarré au ponton. On l’avait croisé à Nuuk l’été passé. Il va tenter aussi le Nord-ouest cet été et poursuivre avec le passage du Nord-est!
De retour sur Morgane avec les sacs à dos remplis de bonnes choses à manger, on relève l’ancre à 16:30 après une bonne platée de pâtes ,(...) nous profitons de cette belle météo pour continuer sous voiles en direction de l’île Disko.
En chemin, Denis part pisser sous le vent les poches ouvertes: Click, Plouf, Merde! C’est quoi??
"Noooooon j’y crois pas ! Ce fichu portable passe à l’eau!"
ros fou rire s’en suit mais on en parle pas plus. Grâce à sa longue expérience de perte de portable Denis s’en remet très vite!
On fait escale sur une des Îles au milieu de la baie de Disko encombrée d’icebergs.
Chaque iceberg a sa particularité, plus grands, plus petits, certains ressemblent à des immeubles de 6 étages d’autres à des pics vertigineux bref y en a pour tous les goûts.
On mouille au fond d’une baie à l’Est de l’île Kroneprinses Ejland. Un joli iceberg bouche la moitié de l’entrée de la baie de Baadeloeb et nous offre une vue splendide pendant que nous essayons de pêcher un cabillaud.
Mercredi 19 juin: A 11:40 on reprend notre navigation dans la baie de Disko sous SPI cette fois-ci. On slalome entre les majestueux Icebergs sous un soleil qui brille de mille feux. On avance à deux noeuds. Juste assez pour garder le SPI bien gonflé et tourner des belles images avec le drone. Le stress est à son comble tant du point de vue danger d’un éventuel retournement d’un iceberg que pour la survie du drone. A cette vitesse on peut entendre la glace qui craque, les icebergs s’effritent sous cette chaleur d’été! De temps en temps le bruit est d’une telle violence qu’on croit qu’une avalanche va nous arriver droit dessus!
On entend même le souffle puissant d’une baleine qui passe à quelques mètres de Morgane.
Deux heures plus tard le vent est complètement tombé on continue donc au moteur pour rejoindre le petit port de Qeqertarsuaq sur l’île de Disko. A 17:00 on mouille dans la baie juste devant le village.
On embarque les parapentes dans l’annexe et on s’offre un joli vol en soaring juste au dessus de la plage inondée d’icebergs. Dommage que ça ne dure pas infiniment!
En rentrant par la plage, les mecs profitent de la petite rivière qui passe par là pour se raser face à un groupe de 4 baleines qui ont élu domicile de chasse à la sardine arctique. Là, oui là juste devant nos yeux à 100m! Quel spectacle elles nous offrent! Cette fois ça y est on est scotché. Impossible de retourner sur Morgane. On est fasciné! A cette distance on peut observer parfaitement leur stratagème de chasse. Elles tournent en rond en large d’abord à la surface, soufflent, sondent, puis quelques minutes plus tard resurgissent des profondeurs les 4 en même temps bien serrées. Leurs têtes sortent de l’eau avec leurs bouches remplies de sardines! Et ça recommence..
Elles sont maintenant dans la baie côté port juste à quelques mètre de Morgane!
On s’endort avec les yeux qui piquent! Ça fait mal aux yeux tant de belles choses!
Cette journée du 19 juin restera gravée dans nos mémoires pour un sacré bout de temps!
Le lendemain on profite de la marée haute pour atteindre le ponton de Royal Greenland afin de faire le plein d’eau à l’aide d’un tuyau bleu. Plus pratique que de se geler les mains en remplissant nos jerricanes avec le jet d’eau froide puissant qui sort d’un ruisseau canalisé à côté de la station service.
Le temps de revenir à notre mouillage un petit iceberg a pris notre place! Du coup on jette l’ancre plus près de la berge afin d'être mieux abrités du vent du sud.
On profite d’une petite accalmie du vent pour aller pêcher dans le chenal d’entrée du port. Au moment où toutes nos lignes touchent le fond, deux mastodontes font surface à une vingtaine de mètres de notre petite annexe! Une petite montée d’adrénaline se fait sentir. Chacun s’empresse de remonter sa ligne. Robin se débat avec un loup de mer. Moi je me concentre à les filmer et Denis se demande si c’est pas trop dangereux d’être plantés là au milieu des baleines sans gilet de sauvetage!?
On change de coin et se rapproche du bord et la bingo: des bancs de cabillaud à l’affût des sardines ne font pas la différence entre nos cuillères et s’arrache les appâts. Même pas le temps de laisser descendre la ligne qu’ils se ruent dessus! Nous sommes à la fête forraine: le but étant de chopper les plus gros! Quatre ça suffit pour nos prochains repas. De retour sur Morgane on remonte l’ancre pour la troisième fois (heureusement que nous avons changé récemment la batterie du guindeau) pour aller se mettre à couple d’un bateau de pêche des années 30 super bien entretenu par un danois.
Cette fois on est bon pour rester quelques jours sans bouger en toute sécurité!
Vendredi 21 juin: C’est la fête nationale et il fait un temps de cochon! D’ailleurs toutes les activités en plein air sont annulées. On part visiter la petite galerie d’art de Qeqertarsuaq. Une charmante dame nous informe d’une jolie promenade à faire pour récolter cette plante qui ressemble à du céleri et nous indique les spots où pêcher de la truite..
Où ça de la truite? Robin est au taquet!
On repart illico avec l’annexe dans une des baies à la pêche à la truite de mer.
Malheureusement les sardines n'attirent que les baleines et les cabillauds pour le moment. On se contentera de deux cabillauds.
D’ailleurs il est passé où le couteau pour tirer les filets? Robin pense l’avoir égaré sur le chemin de la baie. Il part à sa recherche pendant que Denis commence à préparer les poissons. Après quelques minutes Robin revient victorieux avec son couteau! En repartant les gaz à fond, je fracture une grosse patate. Rien de mal! L’hélice s’en sort avec quelques égratignures !
A partir de cette date la nuit revient.. enfin on a encore un peu de temps devant nous, elle arrive dans 2 mois seulement!
Samedi 22 juin: On hésite.. On y va? On y va pas?
Tu crois que le vent est assez fort?
Allez on tente!
On enfile les combinaisons néoprène puis par dessus les combinaisons sèches, les cagoules, les gants, les baskets et les harnais sur la taille. Avec tout cet accoutrement on peut à peine bouger et respirer !
Pour rejoindre la plage, nous devons marcher à travers le village. Ils vont où comme ça avec leur planche de surf et leur sac à dos se demandent les habitants de Qeqertarsuaq.
On va faire du kite!! Du kitesurf avec les icebergs!
On gonfle nos voiles (9m et 12m) on connecte les lignes et c’est parti pour une bonne demi heure à tirer des bords entre les glaçons!
Grandiose cette session! Même les baleines assistent au show en plus de la moitié du village qui accoure sur la plage! On n'exagère pas! On navigue pas trop loin. Le vent souffle off shore ce qui signifie que si on casse une ligne on part au large! Alors on assure! On évite de sauter par dessus les icebergs. On sent à peine le froid avec nos déguisements de cosmonaute! On a la chance d’avoir Denis pour nous mitrailler de photos depuis la plage. Woohoo quelle expédition! Je dirais même c’était une session de malade!!
De retour au bateau on passe se dessaler au tuyau d’eau fraîche à haut débit de la station service et de tout faire sécher sur le pont.
Après avoir passé 2 heures à tout sortir on se remet à passer 2 heures à tout ranger sous les remarques de Denis qui trouve impressionnant ce jeu de Tetris qu’il a fallu mettre au point pour emporter tout ce matériel à bord sans qu’il encombre le lieu de vie de Morgane.
On se mange une bonne saucisse à rôtir pour reprendre des forces avant de repartir se promener dans la vallée des points jaunes. En effet après une bonne grosse heure de marche le long de la côte, nous arrivons dans un petit cirque de roche volcanique, tapissé de verdure avec des petites cascades qui tombent des falaises bordées par de la mousse verte fluo. Un vrai jardin d’Éden. On cueille un peu de céleri local qui semble être de l’angélique d’après Denis. Les colonnes et les couches plissées du basalte dessinent des mosaïques. On se croirait dans un jardin japonais. Magnifique !!
Dimanche 23 juin: Départ pour retourner en direction d’Aasiaat. A peine sorti du chenal reliant le port, on s’approche au moteur d’un énorme iceberg à deux pics. Il doit bien faire 200m de haut et 300m de large. Ca vaut la peine de se faire une petite séquence stress avec le drone. Une des face de l’iceberg est sculptée en forme d’arche à travers laquelle on aperçois Morgane. Il y a aussi une magnifique piscine d’eau turquoise à l’intérieur. Quelle pièce!
A mi chemin, nous faisons escale sur la minuscule Kitsissuarsuit, 53 habitants, dont le nom signifie l’île aux chiens comme l’appelaient les Hollandais. D’après un livre, la première fois qu’ils sont arrivés avec leurs baleiniers et qu’ils ont débarqués sur l’île, ils n'ont trouvé que des maisons et des chiens. Mais aucun humain. Ils ont pensé que l’île appartenait aux chiens. En fait, les hommes étaient partis à la pêche!
On mouille au milieu de la baie entre le village et des petites îles peuplées de chiens. Quelques minutes plus tard on se croirait plutôt au bord de l’autoroute !
Avec leurs petits bateaux moteur, ils passent comme des bolides à quelques mètres de Morgane! Ça fait peur! Heureusement il fait jour tout le temps et les pêcheurs vont bientôt aller se mettre au lit ?!
Kitsissuarsuit, on en fait vite le tour. Les habituels pisiniarfik, séchoirs à poissons, chapelle, terrain de foot, aire de jeu, héliport, caserne de pompier, décharge et cimetière. Tout y est! On est charmé par ses maisons patinées, ses marches d’escalier bien placées et sa vue à 360 degrés sur la baie de Disko et les icebergs.
D’ailleurs Denis passerait bien deux mois d’été à Kitsissarsuit même pourquoi pas un hiver!
Le lendemain avant de nous remettre en route pour Aasiaat, je pars à bord du dingy donner nos deux filets de truite séchée (suspendus au moteur hors bord depuis près d’un mois..) aux 4 chiens qui résident sur l’île juste à côté de l'endroit où est mouillé Morgane. Le temps de leur faire encore un petit câlin et nous revoilà repartis au moteur pour nous arrêter 10 milles nautiques plus loin dans une petite baie parfaitement abritée juste en face d’Aasiaat. On veut profiter encore d’une nuit bien au calme avant de rejoindre le port d’Aasiaat.
Enfin on récupère nos skis et nos planches de Surf chez Elizabeth et Magnus.
Eh oui! Il est temps de faire un bout de route en direction du nord! Il commence à faire trop chaud sur le cercle polaire arctique!
De retour au bateau avec l’annexe chargée comme une mule sous le regard amusé d’Elizabeth qui se demande bien comment on arrive à manœuvrer avec nos deux gros board bag, Denis nous accueille sur Morgane! Son vol est finalement arrivé en avance!
Denis c’est un ami voileux de Robin. Il est passionné de bateau en bois et navigue souvent entre La Rochelle et la Bretagne en passant par le lac de Neuch!
Donc l’idée pour ces prochaines semaines est de naviguer jusqu’à Aasiaat, situé à l’entrée de la baie de Disko. Mais pour y arriver, il nous faut du vent du sud ou pétole (pas de vent)! Alors en attendant que le vent du Nord veuille bien se calmer, on se balade dans Sisimiut, on passe par la bibliothèque pour un check wifi et au Pissifik pour ravitailler Morgane.
La veille du départ on mange une dernière salade de pissenlits fraîchement cueillis et on passe embrasser une dernière fois Elizabeth et Magnus en espérant ne pas revenir tout de suite à Sisimiut! Même si on s’y sent comme à la maison ..
Mercredi 12 juin: A 11:15 on met les voiles sous un magnifique ciel bleu ! Bye bye Sisimiut! Cap au nord à la recherche d’un mouillage pour s’abriter d’un coup de sud pour la nuit. On longe la côte tout en sachant que jusqu’à Ukivik il est difficile de trouver une petite baie bien abritée sans devoir s’enfoncer dans l’un des trois fjords au nord de Sisimiut. On en a quand même repéré quatre sur la carte mais notre sondeur nous indique à chaque fois qu’il n’y a pas assez d’eau pour mouiller l’ancre. Finalement après 4h de partie de cache-cache on mouille l’ancre juste derrière le phare de Ukivik, ancienne station baleinière.
Les gars sont partis avec l’annexe pêcher et faire un petit tour à terre pour ramener un bois de renne à la place des truites souhaitées. A leur retour, le vent a tourné sud et il commence à souffler un peu fort pour passer la nuit en sécurité.. du coup on relève l’ancre et partons nous mettre à l’abri de l’île qui marque le cap le plus à l’ouest du Groenland.
Jeudi 13 juin: La nuit a été calme. Mais trop courte! Les mecs sont debout à 6:00 du mat pour se remettre en route avant qu’un nouveau coup de sud ne nous arrive dessus. Le temps est gris, il pleut. J’émerge de ma couchette à l’entrée du deuxième fjord 4h après qu’on soit partis!
Cette fois on perd moins de temps pour trouver un abri. On mouille l’ancre dans une petite anse au sud du fjord Nordre Stroemfjord et on profite d’une belle éclaircie pour aller se balader à terre jusqu’au lac situé à 2 kms. On lézarde pas trop longtemps! De notre point de vue perché sur les cailloux comme tombés du ciel, on voit qu’à l’extérieur du fjord au large ça souffle fort! La mer est toute blanche ! On s’empresse de remonter à bord de Morgane pour se déplacer encore de quelques mètres afin de mouiller le plus près possible de la minuscule plage entre les deux patates. Le vent se renforce .. on décide de mettre une deuxième ancre pour être sûr de ne pas déraper! On ne quitte plus le bateau cette fois-ci. On joue aux cartes, on mange, on lit, on dort et on check toutes les 5 minutes notre position.. et la météo! Pas le temps de s’embêter!
Samedi 15 juin: Voilà tout s'est bien passé! Le bateau n’a pas bougé d’un poil, le pont est rincé, le ciel bleu revient, après 48h de planque on peut donc se remettre en route vers 10:30 pour rejoindre Attu, un petit village construit sur une petite île.
On commence à croiser de plus en plus d’icebergs. Denis ne lâche plus la barre! On mouille juste devant le village en évitant deux gros glaçons.
Dimanche 16 juin: On continue notre visite de petits villages côtiers avec un temps splendide. Après une belle navigation à la voile au milieu des petites îles et le passage critique d’une petite passe jonchée de cailloux mal répertoriés et à fort courant contraire, on mouille l’ancre devant Kangasiaq. Il est 22:00 le vent est complètement tombé, condition idéale pour pêcher. Ça fait longtemps que nous n’avons rien choppé ! La pêche est variée. Étoile de mer, rascasse, flétans et même un loup de mer a mordu à l’hameçon de Denis. A nouveau on se demande si c’est bon à manger. Il est énorme. On se demande aussi comment on va le sortir de l’eau sans y laisser un doigt .. bref ce moment d’incertitude lui permet de retrouver sa liberté! Tant mieux pour lui. On se contentera de deux petits cabillauds au four.
Le lendemain matin on débarque à la commune où nous sommes reçus comme des princes! La charmante dame nous souhaite la bienvenue et nous autorise à utiliser l’ordinateur pour checker la météo et l’état des glaces.
Plus l’été s’installe et plus notre espoir de rejoindre le pacifique par le passage du nord-ouest se renforce.
Après un petit passage obligé au Pissifik nous relevons l’ancre à 15:00 et hissons les voiles pour rejoindre Aasiaat.
On mouille dans une petite baie au sud d’Aasiaat juste à côté d’une petite île peuplée de 25 chiens groenlandais. Les chiens du Groenland sont constitués de 70% de gènes de loup. L’avantage de les placer sur ces îles est qu’ils n’ont pas besoin d’être attaché. Malheureusement ils n’ont pas appris à nager.
Mardi 18 juin: Après un bon petit déjeuner on part se dégourdir les jambes pour rejoindre à pieds le village d’Aasiaat situé à 3-4 km du mouillage. On visite la bibliothèque qui occupe une maison ancienne joliment perchée avec la vue sur la baie de Disko. On aperçoit au loin les glaciers de l’île Disko. Ce premier point de vue est juste magnifique!
On s’arrête ensuite au port pour saluer André le navigateur hollandais avec son Willywaw amarré au ponton. On l’avait croisé à Nuuk l’été passé. Il va tenter aussi le Nord-ouest cet été et poursuivre avec le passage du Nord-est!
De retour sur Morgane avec les sacs à dos remplis de bonnes choses à manger, on relève l’ancre à 16:30 après une bonne platée de pâtes ,(...) nous profitons de cette belle météo pour continuer sous voiles en direction de l’île Disko.
En chemin, Denis part pisser sous le vent les poches ouvertes: Click, Plouf, Merde! C’est quoi??
"Noooooon j’y crois pas ! Ce fichu portable passe à l’eau!"
ros fou rire s’en suit mais on en parle pas plus. Grâce à sa longue expérience de perte de portable Denis s’en remet très vite!
On fait escale sur une des Îles au milieu de la baie de Disko encombrée d’icebergs.
Chaque iceberg a sa particularité, plus grands, plus petits, certains ressemblent à des immeubles de 6 étages d’autres à des pics vertigineux bref y en a pour tous les goûts.
On mouille au fond d’une baie à l’Est de l’île Kroneprinses Ejland. Un joli iceberg bouche la moitié de l’entrée de la baie de Baadeloeb et nous offre une vue splendide pendant que nous essayons de pêcher un cabillaud.
Mercredi 19 juin: A 11:40 on reprend notre navigation dans la baie de Disko sous SPI cette fois-ci. On slalome entre les majestueux Icebergs sous un soleil qui brille de mille feux. On avance à deux noeuds. Juste assez pour garder le SPI bien gonflé et tourner des belles images avec le drone. Le stress est à son comble tant du point de vue danger d’un éventuel retournement d’un iceberg que pour la survie du drone. A cette vitesse on peut entendre la glace qui craque, les icebergs s’effritent sous cette chaleur d’été! De temps en temps le bruit est d’une telle violence qu’on croit qu’une avalanche va nous arriver droit dessus!
On entend même le souffle puissant d’une baleine qui passe à quelques mètres de Morgane.
Deux heures plus tard le vent est complètement tombé on continue donc au moteur pour rejoindre le petit port de Qeqertarsuaq sur l’île de Disko. A 17:00 on mouille dans la baie juste devant le village.
On embarque les parapentes dans l’annexe et on s’offre un joli vol en soaring juste au dessus de la plage inondée d’icebergs. Dommage que ça ne dure pas infiniment!
En rentrant par la plage, les mecs profitent de la petite rivière qui passe par là pour se raser face à un groupe de 4 baleines qui ont élu domicile de chasse à la sardine arctique. Là, oui là juste devant nos yeux à 100m! Quel spectacle elles nous offrent! Cette fois ça y est on est scotché. Impossible de retourner sur Morgane. On est fasciné! A cette distance on peut observer parfaitement leur stratagème de chasse. Elles tournent en rond en large d’abord à la surface, soufflent, sondent, puis quelques minutes plus tard resurgissent des profondeurs les 4 en même temps bien serrées. Leurs têtes sortent de l’eau avec leurs bouches remplies de sardines! Et ça recommence..
Elles sont maintenant dans la baie côté port juste à quelques mètre de Morgane!
On s’endort avec les yeux qui piquent! Ça fait mal aux yeux tant de belles choses!
Cette journée du 19 juin restera gravée dans nos mémoires pour un sacré bout de temps!
Le lendemain on profite de la marée haute pour atteindre le ponton de Royal Greenland afin de faire le plein d’eau à l’aide d’un tuyau bleu. Plus pratique que de se geler les mains en remplissant nos jerricanes avec le jet d’eau froide puissant qui sort d’un ruisseau canalisé à côté de la station service.
Le temps de revenir à notre mouillage un petit iceberg a pris notre place! Du coup on jette l’ancre plus près de la berge afin d'être mieux abrités du vent du sud.
On profite d’une petite accalmie du vent pour aller pêcher dans le chenal d’entrée du port. Au moment où toutes nos lignes touchent le fond, deux mastodontes font surface à une vingtaine de mètres de notre petite annexe! Une petite montée d’adrénaline se fait sentir. Chacun s’empresse de remonter sa ligne. Robin se débat avec un loup de mer. Moi je me concentre à les filmer et Denis se demande si c’est pas trop dangereux d’être plantés là au milieu des baleines sans gilet de sauvetage!?
On change de coin et se rapproche du bord et la bingo: des bancs de cabillaud à l’affût des sardines ne font pas la différence entre nos cuillères et s’arrache les appâts. Même pas le temps de laisser descendre la ligne qu’ils se ruent dessus! Nous sommes à la fête forraine: le but étant de chopper les plus gros! Quatre ça suffit pour nos prochains repas. De retour sur Morgane on remonte l’ancre pour la troisième fois (heureusement que nous avons changé récemment la batterie du guindeau) pour aller se mettre à couple d’un bateau de pêche des années 30 super bien entretenu par un danois.
Cette fois on est bon pour rester quelques jours sans bouger en toute sécurité!
Vendredi 21 juin: C’est la fête nationale et il fait un temps de cochon! D’ailleurs toutes les activités en plein air sont annulées. On part visiter la petite galerie d’art de Qeqertarsuaq. Une charmante dame nous informe d’une jolie promenade à faire pour récolter cette plante qui ressemble à du céleri et nous indique les spots où pêcher de la truite..
Où ça de la truite? Robin est au taquet!
On repart illico avec l’annexe dans une des baies à la pêche à la truite de mer.
Malheureusement les sardines n'attirent que les baleines et les cabillauds pour le moment. On se contentera de deux cabillauds.
D’ailleurs il est passé où le couteau pour tirer les filets? Robin pense l’avoir égaré sur le chemin de la baie. Il part à sa recherche pendant que Denis commence à préparer les poissons. Après quelques minutes Robin revient victorieux avec son couteau! En repartant les gaz à fond, je fracture une grosse patate. Rien de mal! L’hélice s’en sort avec quelques égratignures !
A partir de cette date la nuit revient.. enfin on a encore un peu de temps devant nous, elle arrive dans 2 mois seulement!
Samedi 22 juin: On hésite.. On y va? On y va pas?
Tu crois que le vent est assez fort?
Allez on tente!
On enfile les combinaisons néoprène puis par dessus les combinaisons sèches, les cagoules, les gants, les baskets et les harnais sur la taille. Avec tout cet accoutrement on peut à peine bouger et respirer !
Pour rejoindre la plage, nous devons marcher à travers le village. Ils vont où comme ça avec leur planche de surf et leur sac à dos se demandent les habitants de Qeqertarsuaq.
On va faire du kite!! Du kitesurf avec les icebergs!
On gonfle nos voiles (9m et 12m) on connecte les lignes et c’est parti pour une bonne demi heure à tirer des bords entre les glaçons!
Grandiose cette session! Même les baleines assistent au show en plus de la moitié du village qui accoure sur la plage! On n'exagère pas! On navigue pas trop loin. Le vent souffle off shore ce qui signifie que si on casse une ligne on part au large! Alors on assure! On évite de sauter par dessus les icebergs. On sent à peine le froid avec nos déguisements de cosmonaute! On a la chance d’avoir Denis pour nous mitrailler de photos depuis la plage. Woohoo quelle expédition! Je dirais même c’était une session de malade!!
De retour au bateau on passe se dessaler au tuyau d’eau fraîche à haut débit de la station service et de tout faire sécher sur le pont.
Après avoir passé 2 heures à tout sortir on se remet à passer 2 heures à tout ranger sous les remarques de Denis qui trouve impressionnant ce jeu de Tetris qu’il a fallu mettre au point pour emporter tout ce matériel à bord sans qu’il encombre le lieu de vie de Morgane.
On se mange une bonne saucisse à rôtir pour reprendre des forces avant de repartir se promener dans la vallée des points jaunes. En effet après une bonne grosse heure de marche le long de la côte, nous arrivons dans un petit cirque de roche volcanique, tapissé de verdure avec des petites cascades qui tombent des falaises bordées par de la mousse verte fluo. Un vrai jardin d’Éden. On cueille un peu de céleri local qui semble être de l’angélique d’après Denis. Les colonnes et les couches plissées du basalte dessinent des mosaïques. On se croirait dans un jardin japonais. Magnifique !!
Dimanche 23 juin: Départ pour retourner en direction d’Aasiaat. A peine sorti du chenal reliant le port, on s’approche au moteur d’un énorme iceberg à deux pics. Il doit bien faire 200m de haut et 300m de large. Ca vaut la peine de se faire une petite séquence stress avec le drone. Une des face de l’iceberg est sculptée en forme d’arche à travers laquelle on aperçois Morgane. Il y a aussi une magnifique piscine d’eau turquoise à l’intérieur. Quelle pièce!
A mi chemin, nous faisons escale sur la minuscule Kitsissuarsuit, 53 habitants, dont le nom signifie l’île aux chiens comme l’appelaient les Hollandais. D’après un livre, la première fois qu’ils sont arrivés avec leurs baleiniers et qu’ils ont débarqués sur l’île, ils n'ont trouvé que des maisons et des chiens. Mais aucun humain. Ils ont pensé que l’île appartenait aux chiens. En fait, les hommes étaient partis à la pêche!
On mouille au milieu de la baie entre le village et des petites îles peuplées de chiens. Quelques minutes plus tard on se croirait plutôt au bord de l’autoroute !
Avec leurs petits bateaux moteur, ils passent comme des bolides à quelques mètres de Morgane! Ça fait peur! Heureusement il fait jour tout le temps et les pêcheurs vont bientôt aller se mettre au lit ?!
Kitsissuarsuit, on en fait vite le tour. Les habituels pisiniarfik, séchoirs à poissons, chapelle, terrain de foot, aire de jeu, héliport, caserne de pompier, décharge et cimetière. Tout y est! On est charmé par ses maisons patinées, ses marches d’escalier bien placées et sa vue à 360 degrés sur la baie de Disko et les icebergs.
D’ailleurs Denis passerait bien deux mois d’été à Kitsissarsuit même pourquoi pas un hiver!
Le lendemain avant de nous remettre en route pour Aasiaat, je pars à bord du dingy donner nos deux filets de truite séchée (suspendus au moteur hors bord depuis près d’un mois..) aux 4 chiens qui résident sur l’île juste à côté de l'endroit où est mouillé Morgane. Le temps de leur faire encore un petit câlin et nous revoilà repartis au moteur pour nous arrêter 10 milles nautiques plus loin dans une petite baie parfaitement abritée juste en face d’Aasiaat. On veut profiter encore d’une nuit bien au calme avant de rejoindre le port d’Aasiaat.